La sclérose en plaques chez les enfants

Que signifie le diagnostic de sclérose en plaques durant l'enfance ou l'adolescence.

Neuroradiologie

Afin d'exclure d'éventuelles autres maladies présentant des symptômes similaires et de pouvoir établir un diagnostic de sclérose en plaques, on utilise l'imagerie par résonance magnétique du crâne et de la colonne vertébrale.

Le diagnostic de la sclérose en plaques chez les enfants et les adolescents suscite de nombreuses craintes et des questions. Il touche toute la famille. Grâce à un diagnostic précoce et à des approches thérapeutiques modernes, toutes les personnes concernées peuvent choisir ensemble la bonne stratégie à mettre en place pour chaque individu.

L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est désormais incontournable dans le domaine de la sclérose en plaques chez l’enfant et l’adolescent. Une IRM est un procédé qui permet de fournir des images tomographiques (en coupe) du corps grâce à un puissant champ magnétique. Ceci permet de représenter des organes comme le cerveau ou la moelle de manière claire et précise. Ainsi, l’IRM est la pierre angulaire du diagnostic. Elle est cruciale lorsqu’il est question de déterminer l’efficacité d’un traitement et constitue l’outil de mesure le plus important dans la recherche sur la SEP de l’enfant et de l’adolescent.

Diagnostic

Afin d’être en mesure d’exclure d’autres maladies s’accompagnant des mêmes symptômes et d’établir un diagnostic de sclérose en plaques, l’on va se tourner vers un examen IRM du crâne et de la colonne vertébrale. Si, chez les adolescents, les lésions cérébrales typiques de la SEP sont comparables à celles de l’adulte, il convient chez les jeunes enfants de tenir compte du développement de la substance blanche (ce que l’on appelle la myélinisation) lors de l’interprétation. Il faut en outre s’assurer que les symptômes ne sont pas liés à une autre affection cérébrale inflammatoire, à une infection ou à une maladie métabolique. Pour l’interprétation de l’IRM, il est impératif de recourir à des neuroradiologues disposant d’une expérience suffisante dans le domaine pédiatrique. Afin d’évaluer la charge lésionnelle initiale du cerveau, l’on réalise aussi à titre complémentaire une IRM de la colonne vertébrale. Comme pour les adultes, les critères de McDonald de 2017 sont utilisés pour l’évaluation de la dissémination temporelle et spatiale de la SEP de l’enfant et de l’adolescent. Ces critères constituent une procédure standardisée pour le diagnostic de la SEP.

Evaluation de l’activité pathologique et de la réponse thérapeutique

Tous les six à douze mois, des IRM de contrôle sont réalisées à intervalle régulier. Elles fournissent un aperçu de l’activité pathologique et de l’efficacité du traitement à long terme. En général, l’IRM cérébrale suffit à surveiller et contrôler le traitement. L’on ne réalise d’IRM médullaire régulière que lorsque des processus inflammatoires surviennent au niveau de la moelle épinière ou que la charge lésionnelle initiale est très développée dans la région de la colonne vertébrale. La première phrase où l’on va ajuster la posologie du médicament dure de trois à six mois en fonction de la substance. Si de nouvelles lésions continuent de survenir après cette phase de dosage, cela signifie que le médicament choisi ne suffit pas à contrôler la SEP. Si tel est le cas, il convient d’évoquer avec le patient l’éventualité d’un changement ou d’un accroissement du traitement. Aussi, pour trouver une alternative adaptée, il faudra tenir compte de l’âge, des poussées survenues jusque-là et du rétablissement du patient. Par la suite, l’on évalue le traitement actuel de la SEP et les médicaments utilisés, la charge lésionnelle totale et la mise en évidence d’activités inflammatoires (c.-à-d. les lésions apparentes grâce à l’agent de contraste).

Recherche

Grâce aux technologies modernes, l’IRM permet d’en savoir davantage sur la pathologie structurelle. Elle permet de rendre visibles des processus qui se déroulent en arrière-plan. Concrètement, cela signifie dans un premier temps que l’on dispose d’un aperçu des lésions de la substance blanche liées à la SEP même au niveau des zones non lésées. Ceci se fait en recourant à l’anisotropie fractionnelle. Dans un second temps, les modifications du volume cérébral au fil du temps et l’ampleur de l’atrophie cérébrale sont identifiables grâce à des procédés d’analyse quantitatifs (volumétrie), et, troisièmement, l’activation de réseaux neuronaux lors de tâches standardisées l’est par le biais d’une IRM fonctionnelle (IRMf). L’objectif de ces examens est d’optimiser encore davantage le traitement de la SEP chez l’enfant ou l’adolescent et de comprendre lequel est le plus adapté aux besoins du jeune patient. Il est ici question de médecine personnalisée. La recherche est une base et une condition afin que les expériences cliniques individuelles puissent être compilées et analysées de manière systématique et structurées. C’est la seule manière d’établir des connaissances qui seront valables pour des groupes de patients plus larges.

Texte: PD Dr. med. Sandra Bigi, MD MSc, Inselspital, Hôpital Universitaire de Berne

Différences par rapport aux adultes atteints de SEP

Le point central et primordial dans le traitement des enfants et des adolescents atteints de SEP est que la maladie attaque un cerveau qui est encore en développement.

La sclérose en plaques se manifeste également chez les enfants et les adolescents. Si l'on compare l'évolution de la maladie chez les adultes et chez les enfants, on constate des différences importantes malgré les nombreuses similitudes.

La SEP de l’enfant et de l’adolescent n’est pas fondamentalement différente de celle de l’adulte. On suppose que les mêmes mécanismes sous-jacents sont à l’œuvre (quand bien même ceux-ci ne sont pas encore entièrement compris) et les approches thérapeutiques sont elles aussi similaires. Toutefois, il existe aussi des différences manifestes, notamment concernant la fréquence, la présentation clinique et l’évolution, tant d’éléments qui vont avoir une influence sur la prise en charge de ces jeunes patients.

L’élément le plus crucial à prendre compte concernant le traitement d’enfants et les adolescents atteints de SEP est le fait que la maladie attaque un cerveau qui est toujours en train de se développer.  Concrètement, cela signifie que des processus inflammatoires chroniques surviennent au niveau d’un cerveau qui n’est pas encore arrivé à maturité. D’après nos connaissances actuelles, c’est la cause principale des handicaps cognitifs précoces et de la diminution du volume cérébral chez l’enfant et l’adolescent atteint de SEP (voir ci-dessous).

En quoi la SEP de l’enfant et de l’adolescent est-elle différente de celle de l’adulte?

Avec une prévalence de 1-3/100’000 personnes, la SEP de l’enfant et de l’adolescent est considérée comme une véritable maladie rare. Ce qui signifie aussi que la majeure partie des pédiatres n’ont pas forcément l’occasion d’acquérir une grande expérience, comme cela pourrait être le cas avec d’autres maladies de l’enfant. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire de consulter en outre un pédiatre spécialisé, qui a une connaissance approfondie des maladies rares du cerveau en développement – plus concrètement de la SEP – pour une prise en charge professionnelle optimale. Chez nous, ce sont des neuropédiatres. Des répercussions sur les possibilités scientifiques se font sentir face aux maladies rares. La recherche clinique est essentielle pour mieux comprendre la SEP de l’enfant et de l’adolescent, mais aussi pour optimiser les traitements. Il faut un vaste réseau afin de rendre possible une recherche méthodologiquement solide et de nombreuses collaborations afin de collecter des chiffres véritablement révélateurs. Là-dessus, les registres fournissent une contribution essentielle.

Registre Suisse des maladies inflammatoires du cerveau à l’âge pédiatrique​​

Les enfants et les adolescents atteints de SEP ont plus de poussées et connaissent un accroissement plus rapide des lésions cérébrales inflammatoires. Si l’on se penche sur les premières années suivant le diagnostic, les enfants et les adolescents ont deux à trois fois plus de poussées que les adultes. On observe aussi sur les IRM de contrôle réalisées à intervalle régulier un plus grand nombre de nouvelles lésions sur une même période. Celles-ci sont notamment situées au niveau de la fosse crânienne postérieure. Les jeunes enfants (de manière générale avant la puberté) présentent des lésions de taille importante, partiellement mal délimitées. Mais l’on ne comprend pas totalement pourquoi c’est le cas. On suppose que cela a un lien avec la maturation ou l’activité du système immunitaire. Les enfants et les adolescents atteints de SEP ont un excellent potentiel de récupération, c’est-à-dire que la grande majorité d’entre eux ont la capacité de se remettre entièrement des premières poussées. C’est une bonne chose pour les patients en phase aiguë, mais c’est en même temps insidieux, étant donné que l’on a moins conscience de l’ampleur de la maladie, et que cela va potentiellement remettre en question la nécessité du traitement quand bien même celui-ci est indispensable.

Un tiers des enfants et adolescents souffrant de SEP montrent très tôt des handicaps cognitifs problématiques au quotidien, c’est-à-dire dans les trois ans suivant le diagnostic.  Ces déficits cognitifs précoces constituent la différence la plus marquée avec la SEP de l’adulte. Le processus inflammatoire chronique va toucher le cerveau alors qu’il est encore en train de se développer et donc qu’il est extrêmement vulnérable. Cela va donner lieu à une croissance cérébrale amoindrie (en comparaison avec des personnes du même âge), ainsi qu’à une myélinisation altérée (c’est-à-dire la synthétisation de myéline autour des fibres nerveuses afin de les protéger) et à une maturation différentes des réseaux neuronaux. La vitesse de traitement s’en retrouve le plus souvent affectée. Ceci signifie que le traitement des informations nécessite plus de temps que chez les personnes en bonne santé. Dans les situations complexes telles que les examens scolaires, cela donne lieu à des difficultés potentiellement très frustrantes, notamment chez les adolescents. Néanmoins, grâce à de petits ajustements (des tiers-temps ou un allégement des exercices lors des examens par exemple), il est possible de remédier facilement à ces obstacles et d’aider les personnes atteintes de SEP à développer pleinement leurs capacités.

Lorsque la SEP touche de très jeunes enfants, des difficultés langagières supplémentaires peuvent survenir (problème pour trouver les mots, manque de fluidité verbale). A plusieurs égards, les handicaps cognitifs représentent un défi qui doit être abordé et relevé de manière active. Les problèmes cognitifs étant invisibles «de l’extérieur», il faut généralement du temps avant que les personnes atteintes reçoivent le soutien nécessaire auquel elles peuvent prétendre. Il n’est pas rare qu’elles doivent tout d’abord faire face à des incompréhensions puisque la SEP de l’enfant et de l’adolescent n’est pas suffisamment connue. Il est donc d’autant plus important de sensibiliser la population à ce tableau clinique. Les patients sont souvent touchés à des périodes clés de leur scolarité, pendant leur orientation professionnelle ou leurs premiers pas vers l’indépendance. Afin de prendre en charge et d’accompagner ces jeunes patients de manière optimale dans cette phase décisive de leur vie, une bonne collaboration entre les patients, les médecins, les neuropsychologues et l’école est absolument indispensable.

Texte: PD Dr. med. Sandra Bigi, MD MSc, Inselspital, Hôpital Universitaire de Berne

La sclérose en plaques chez l'enfant et l'adolescent n'est pas une maladie fondamentalement différente de la sclérose en plaques chez l’adulte. On suppose que les mêmes mécanismes sont à l’œuvre (bien qu'ils ne soient pas encore totalement compris).

Symptômes et diagnostic

Malgré d'excellentes possibilités de traitement, le diagnostic de sclérose en plaques est effrayant et soulève de nombreuses questions et incertitudes.

La sclérose en plaques chez l’enfant et l'adolescent n'est pas une maladie fondamentalement différente de celle des adultes. Néanmoins, la fréquence des poussée et leur déroulement peuvent présenter de nettes différences entre les enfants, les adolescents et les adultes atteints de SEP.

Comme chez l’adulte, le diagnostic de la SEP chez l’enfant et l’adolescent repose sur la mise en évidence de foyers inflammatoires disséminés dans le temps et l’espace. De manière générale, il s’agit de démontrer qu’il est bien question d’une maladie inflammatoire chronique qui touche plusieurs régions du cerveau (propagation spatiale des foyers inflammatoires) et qui survient plusieurs fois de manière indépendante (survenue temporaire des foyers inflammatoires). Depuis la dernière révision des critères de McDonald (à savoir, un protocole permettant le diagnostic standardisé d’une sclérose en plaques), qui a donné lieu à la version actuelle de 2017, ceux-ci peuvent désormais être utilisés sans restriction d’âge chez l’enfant et l’adolescent afin de diagnostiquer la SEP.

La SEP par rapport à d’autres maladies cérébrales inflammatoires de l’enfant et de l’adolescent

L’acquisition de connaissances quant à la fréquence et à la répartition des maladies inflammatoires du système nerveux chez l’enfant et l’adolescent est d’une importance cruciale. En effet, la fréquence et la répartition ne sont pas les mêmes chez les adultes que chez les plus jeunes. Pendant l’enfance et l’adolescence, les maladies inflammatoires du système nerveux sont extrêmement rares. Il y a d’un côté les maladies cérébrales démyélinisantes. L’on entend par là une détérioration du système nerveux où l’inflammation va attaquer directement la myéline, la gaine de protection des voies nerveuses. Ainsi, les nerfs ne peuvent plus exercer leur fonction normalement. D’un autre côté, il y a aussi des maladies cérébrales inflammatoires liées à la présence d’anticorps. La SEP appartient au groupe des maladies cérébrales inflammatoires démyélinisantes. Grâce aux données recueillies par un vaste registre canadien, l’on sait que, chez les enfants, une attaque démyélinisante initiale survient selon une prévalence de 1:100 000. Les jeunes patients concernés souffrent d’une inflammation du nerf optique, de la moelle épinière ou encore d’inflammations diffuses touchant diverses régions du cerveau. Chez près d’un quart de ces patients, une SEP est diagnostiquée dans le cadre des clarifications. Chez les trois quarts restants, la réaction inflammatoire est généralement liée à une infection, soit directement provoquée par un germe soit, le plus souvent, à titre de réaction para-infectieuse. Ceci signifie que la majeure partie des enfants et adolescents souffrant d’une inflammation du nerf optique ou de la moelle épinière n’ont pas de SEP.

Les symptômes lors d’une première poussée de SEP chez l’enfant et l’adolescent

Les symptômes que présentent ces enfants et adolescents dépendent de la région du cerveau où survient l’inflammation et doivent au moins survenir pendant 24 heures. Chez les enfants les plus jeunes, plusieurs systèmes sont généralement affectés en même temps. Ils présentent plusieurs symptômes différents qui peuvent être associés à diverses régions du cerveau. Dans un tel cas, l’on parle d’une poussée multifocale. Elle s’oppose à la poussée monofocale, plus classique, que l’on retrouve en cas d’inflammation du nerf optique. Le seul handicap ici se limite à la vue. Dans le cas d’une inflammation de la moelle épinière, «myélite transverse» dans le jargon, la fonction vésicale et (plus rarement) rectale peut être limitée, outre l’apparition de faiblesse musculaire et de troubles sensitifs. Lors de l’examen, il convient d’interroger activement le patient sur d’éventuels troubles de la fonction excrétoire. Pour les enfants et les adolescents, il est souvent très gênant d’en parler de manière spontanée. Le grand nombre de lésions liées à la SEP dans le cervelet et le tronc cérébral constitue une autre particularité liée à l’enfance et l’adolescence. Ces enfants ont des problèmes d’équilibre, des vertiges et des difficultés à bouger les yeux. Les problèmes d’oculomotricité se manifestent par une diplopie (vision double) venant du fait que les mouvements des yeux ne parviennent plus à être coordonnés. Il n’est pas caractéristique, pour un enfant ou un adolescent atteint de SEP, d’être sujet à de nouvelles crises d’épilepsie, de présenter des symptômes psychiatriques marqués ainsi que des troubles du comportement. Ce sont plutôt des indices qui pointent généralement vers une maladie cérébrale liée à la présence d’anticorps.

Examens réalisés dans le cadre d’un diagnostic de la SEP

Lors du diagnostic d’une sclérose en plaques, il s’agit dans un premier temps d’exclure toutes les autres affections inflammatoires, infectieuses ou métaboliques possibles. Pas à pas, toutes les autres maladies potentielles ayant les mêmes symptômes sont éliminées jusqu’à ce qu’il ne reste plus que la SEP comme diagnostic final. Outre l’examen clinique, une IRM de la tête, une analyse sanguine et une ponction lombaire (prélèvement et analyse du liquide rachidien) sont nécessaires. C’est justement cette dernière qui est source d’anxiété. Il est toutefois nécessaire qu’elle soit réalisée afin de disposer d’un diagnostic complet. Il ne faut y renoncer que s’il y a des contre-indications claires. En fournissant des informations et des explications claires sur le déroulement de l’examen et grâce au recours à des «moyens auxiliaires» tels que le protoxyde d’azote (aussi appelé gaz hilarant) et/ou une anesthésie locale spéciale avec patch ainsi qu’une atmosphère calme, il est possible de surmonter cette épreuve. Le soutien des parents est un élément important et une aide considérable.

Implications du diagnostic de la SEP chez l’enfant et l’adolescent

La sclérose en plaques est aujourd’hui encore incurable. Le diagnostic de la SEP suit le patient toute sa vie et nécessite un traitement immunomodulateur ou immunosuppresseur sur des années. Cela signifie que le système immunitaire soit modifié ou inhibé. Malgré des options thérapeutiques excellentes, le diagnostic de la sclérose en plaques fait peur et entraîne de nombreuses questions et incertitudes. Il touche également les familles et les proches des enfants et adolescents concernés. La prise en charge et l’accompagnement de ces jeunes patients incluent systématiquement toute la famille. Il convient de soutenir l’enfant ou l’adolescent dans sa prise d’autonomie et d’indépendance tout en aidant et conseillant les parents qui se font du souci et se posent des questions sur l’avenir comme sur le traitement.

Texte: PD Dr. med. Sandra Bigi, MD MSc, Inselspital, Hôpital Universitaire de Berne

Traitement

Deux approches thérapeutiques sont actuellement discutées dans la littérature scientifique internationale.

On pensait autrefois que la SEP de l’enfant et adolescent était moins grave que celle de l’adulte, principalement parce que les jeunes patients se remettent mieux des poussées. Des recherches récentes le montrent : Oui, la reprise après les premières poussées est effectivement excellente, mais cela ne signifie pas que l’évolution soit meilleure. C'est plutôt l’inverse.

La SEP de l’enfant et de l’adolescent se caractérise par une fréquence plus élevée des poussées et un accroissement rapide des lésions cérébrales inflammatoires, touche le cerveau alors qu’il est en train de se développer et entraîne des handicaps cognitifs, ainsi qu’une atrophie cérébrale. Des problèmes ayant tous des répercussions négatives sur le quotidien. Il n’y a donc aucune bonne raison de priver les enfants et les adolescents atteints de SEP d’un traitement.

Traitement des poussées et à long terme

Chez l’enfant et l’adolescent, l’on fait également la différence entre le traitement des poussées aiguës et un traitement à long terme. Ce dernier influence le système immunitaire sur une longue période, que ce soit par une modification médicamenteuse (immunomodulation) ou par une inhibition de différentes composantes du système immunitaire (immunosuppression). 

Le traitement des poussées a deux objectifs: réduire la durée des poussées et aider le patient à mieux récupérer des symptômes. Comme pour les adultes, les poussées sont traitées avec une perfusion de cortisone à haute dose. Il existe par ailleurs un consensus entre les neuropédiatres suisses. En effet, ceux-ci ont développé un concept permettant un traitement standardisé et homogène des poussées. Si le patient ne s’en est pas suffisamment bien remis, il a la possibilité de suivre d’autres traitements comme une plasmaphérèse (sorte de filtration du sang). La plasmaphérèse a lieu dans les grandes cliniques pédiatriques de Suisse. Celle-ci est sûre et bien tolérée.

L’objectif à moyen terme du traitement de longue durée est d’éliminer les poussées et de prévenir l’apparition de nouvelles lésions cérébrales (c’est-à-dire des lésions cérébrales inflammatoires causées par la SEP).  Grâce aux moyens dont nous disposons aujourd’hui, cet objectif est facile à concrétiser pour tous les jeunes patients atteints de SEP. Le but à long terme est d’éviter autant que possible les déficits cognitifs et l’atrophie cérébrale (difficultés à raisonner et diminution de la substance cérébrale), ou plutôt d’en limiter la progression. A l’heure actuelle, il n’est pas possible sur ce point de déterminer l’efficacité des traitements disponibles étant donné que nous n’avons pas suffisamment de données concernant le long terme.

Quels sont les traitements existants?

A l’heure actuelle, Swissmedic a autorisé en Suisse l’acétate de glatiramère et les interférons par injection ainsi que le fingolimod en comprimé pour traiter des enfants et adolescents atteints de SEP. Le fingolimod est le premier médicament dont l’efficacité et la tolérance ont pu être étayées avec succès par une étude scientifique solide (étude PARADIGMS) portant sur des enfants et des adolescents. Les autres traitements de la SEP sont utilisés «off-label» en cas de forte activité de la maladie. Cela signifie qu’ils n’ont pas été autorisés pour le traitement de la SEP chez l’enfant et l’adolescent, mais qu’ils sont tout de même utilisés chez les patients plus jeunes sur la base de données scientifiques et cliniques portant sur l’adulte. Parmi les substances les plus fréquemment utilisées «off label», l’on retrouve le natalizumab et le rituximab. De nombreux cas permettent d’affirmer que le natalizumab est extrêmement efficace et bien toléré chez les enfants et les adolescents. Puisque nous avons désormais à disposition diverses alternatives en cas de SEP hautement active, le recours au natalizumab devrait se limiter aux patients JCV négatifs et faire l’objet d’un suivi standardisé. Le rituximab a pour avantage une posologie facilement ajustable en fonction du poids, aussi il est facile de l’adapter aux jeunes patients atteints de SEP. Qui plus est, celui-ci n’est pas inconnu en pédiatrie, ce n’est donc pas un «nouveau» médicament pour cette tranche d’âge.

Le traitement à long terme recommandé est systématiquement adapté à chaque patient de manière individuelle. A quoi faut-il faire attention? A l’âge, à l’activité de la maladie et au degré de sévérité déterminé lors du diagnostic, puis à la récupération qui a suivi la première poussée, aux potentielles maladies concomitantes (qui sont heureusement assez rares à cet âge) et – très important – au souhait du jeune patient. Plus clairement: ce n’est que s’il comprend qu’un traitement à long terme l’aidera et qu’il est d’accord que cela sera efficace sur la durée.

Vous trouverez ici un aperçu des thérapies contre l’évolution de la SEP pour les enfants et les adolescents:

Deux approches thérapeutiques

A l’heure actuelle, deux approches thérapeutiques font l’objet de discussions dans la littérature scientifique internationale.

Start slow and escalate (on commence doucement et on augmente): 
Il s’agit généralement de commencer par un immunomodulateur (l’interféron ou l’acétate de glatiramère). Par la suite, dès qu’il s’avère que cela ne fonctionne pas (ce que l’on appelle une «réponse inadéquate» au traitement), l’on passe à un médicament plus fort. Cette approche thérapeutique a pour avantage de pouvoir être poursuivie pendant des années sans qu’il y ait de risque d’effets secondaires graves. Malheureusement, elle ne suffit souvent pas à garder l’activité pathogène sous contrôle.

Start strong, maintain remission (on commence fort et on maintient la rémission):
Cette approche thérapeutique se fonde sur l’activité pathogène élevée, qui s’accompagne très tôt de handicaps cognitifs et d’une atrophie cérébrale. La stratégie thérapeutique consiste ici à «calmer» aussi rapidement que possible la SEP – concrètement, à éviter que l’activité pathogène ne se poursuive. C’est la raison pour laquelle l’on commence directement par un médicament puissant contre la SEP. Si le résultat est bon et stable, il est possible d’envisager une alternative moins puissante.  Cette approche offre comme avantage un contrôle rapide de l’activité pathologique permettant un retour à la vie normale. Qui plus est, les médicaments sont très bien tolérés. Les véritables défis de cette approche sont de bien mesurer le rapport utilité-risques, de savoir s’il est judicieux d’atténuer le traitement et, si c’est le cas, de le faire au bon moment.

Décision individuelle

Pour savoir quelle approche privilégier, il convient d’étudier le cas de chaque patient de manière individuelle. Il est pertinent de se pencher sur les «études de l’histoire naturelle». Ce sont des travaux réalisés à une époque où la SEP de l’enfant et de l’adolescent n’était quasiment jamais diagnostiquée ou traitée et que la maladie suivait son évolution «naturelle». Ils ont permis de mettre en évidence que la phase secondaire progressive se manifestait chez les jeunes adultes et dépendait de l’activité pathologique initiale. Et l’on sait également que la substance blanche qui semble «normale» sur les IRM est tout sauf normale. En d’autres termes, nous savons que ne pas traiter n’est pas la bonne solution. C’est la raison pour laquelle un traitement à long terme est recommandé pour tous les enfants et adolescents diagnostiqués de SEP.

En résumé, le traitement des enfants et des adolescents atteints de SEP représente un véritable défi à plusieurs niveaux. Il doit impérativement être déterminé par des spécialistes qui disposent d’une expérience suffisante.

Texte: PD Dr. med. Sandra Bigi, MD MSc, Inselspital, Hôpital Universitaire de Berne