Les symptômes invisibles et comment y remédier

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De nombreuses personnes atteintes de SEP ne paraissent pas malades. Bon nombre de symptômes ne sont pas visibles de prime abord alors qu’ils ont un impact majeur sur les personnes atteintes. Il peut être difficile de décrire ces symptômes dans la vie privée et professionnelle ainsi que leur influence sur la vie quotidienne.

La SEP affecte chaque personne différemment. Chaque histoire est individuelle. Néanmoins, beaucoup de personnes peuvent se reconnaître dans la description de symptômes isolés, comme on peut le lire dans les citations de personnes affectées ci-dessous. Le Registre SEP a montré que certains symptômes sont communs aux personnes atteintes de SEP. La fatigue en est la manifestation la plus évidente, mais la douleur et les troubles cognitifs font aussi partie de la vie quotidienne de nombreuses personnes atteintes. Certains de ces symptômes ne peuvent pas être traités avec des médicaments, mais il existe des techniques et des stratégies que l’on peut mettre en œuvre au quotidien.

Problèmes cognitifs

La SEP est une maladie du système nerveux central, c’est-à-dire du cerveau et de la moelle épinière. Cela signifie que non seulement la perception et la sensation, mais aussi le contrôle des mouvements et des sentiments ainsi que les fonctions cognitives peuvent être altérés. Il s’agit notamment de la mémoire, du traitement de l’information, de l’attention et de la perception.

«Mon cerveau se fatiguait si vite. Avant, j’étais capable de faire plusieurs choses en même temps, et ça ne me dérangeait pas si on m’en rajoutait une autre. Mais avec le temps, tout est devenu trop pour moi, je ne pouvais plus faire face à la masse d’informations.»

«Souvent, je ne suis pas en mesure de faire mon travail comme je le voudrais. Maintenant, je dois faire les choses les unes après les autres, je ne peux pas faire plusieurs choses à la fois.»

La flexibilité, comme la capacité à effectuer plusieurs tâches en même temps, la concentration et l’endurance, peuvent être sensiblement réduites par la SEP. En d’autres termes, des fonctions qui sont particulièrement importantes pour le travail de bureau. Les difficultés dans la compréhension des textes et des chiffres ou dans la capacité de résoudre des problèmes et d’évaluer une situation sont également courantes.

«Je suis au téléphone avec un client par exemple, je reçois un e-mail, je regarde rapidement et puis d’un coup je me mets à le lire au client. C’est absurde.»

Il faut aussi ménager les ressources mentales

Comme les réserves physiques, l’efficacité mentale est soumise à une certaine limite. Dans le cas d’une maladie du cerveau, la capacité de réserve peut donc être limitée, de sorte qu’il faut être d’autant plus attentif à une utilisation prudente de ses ressources mentales. Il peut s’agir de se concentrer sur certaines tâches et d’en faire attendre d’autres ou de faire abstraction des facteurs perturbateurs (bruit, etc.). L’environnement peut être conçu en optimisant les conditions d’éclairage et d’assise de manière à obtenir les meilleures performances possibles. Par exemple, les performances de mémorisation peuvent être améliorées par des exercices mentaux, que l’on appelle «techniques mnémoniques». Cela permet de mieux ancrer l’information importante dans la mémoire grâce à des stratégies ciblées. Avant d’utiliser des exercices ou des techniques, cependant, il faut faire un «inventaire» des performances mentales. Pour ce faire, on procède à un examen neuropsychologique qui sert à identifier et à quantifier les forces et les faiblesses individuelles. Cela permet à la fois une évaluation réaliste des performances réelles et sert de base à la détection précoce d’éventuels changements.

8 participants au Registre SEP sur 10 déclarent souffrir d'au moins un symptôme invisible.

Douleurs et troubles sensitifs

Une personne atteinte se souvient du moment où, alors qu’elle se tenait derrière le comptoir, elle avait tout d’un coup perdu toute sensation dans son corps de la taille vers le bas.

 «Mon seul point de repère était la cliente face à moi. Elle était debout, je lui arrivais au niveau des yeux. Je pouvais donc supposer que j’étais aussi debout. C’était complètement irréel.»

Des troubles sensitifs ou des troubles sensoriels peuvent survenir dans différentes parties du corps. Les sensations d’engourdissement, de chaleur ou de froid ou les fourmillements sont fréquents.

«La peau de mes jambes est intacte – et pourtant, mes jambes me brûlent!»

Ceci est souvent associé à la douleur, et même les vêtements peuvent faire mal sur les zones sensibles. Il y a aussi des douleurs qui sont une conséquence directe de la sclérose en plaques. Il s’agit notamment de syndromes douloureux aigus tels que la névralgie du trijumeau ou une sensation de décharge électrique lors de la flexion de la colonne cervicale (signe de Lhermitte). Cependant, les douleurs chroniques comme les spasmes musculaires ou les dysesthésies sont beaucoup plus fréquentes. Elles représentent environ 50 à 80% des syndromes douloureux liés à la SEP. L’utilisation d’un clavier peut donner l’impression d’appuyer les doigts sur des aiguilles. Et marcher peut évoquer une sensation comme de «marcher sur du coton». De tels troubles de la sensibilité représentent autant de restrictions dans la vie quotidienne, qu’il s’agisse de taper sur un clavier ou de lacer ses chaussures.

Traitements médicamenteux et non médicamenteux

En principe, un examen médical approfondi est toujours nécessaire en cas de sensations douloureuses afin d’en identifier la cause. Les douleurs peuvent être dues directement à des lésions du système nerveux liées à la SEP (p. ex. névralgie du trijumeau) ou être des troubles secondaires causés par d’autres symptômes de la SEP (p. ex. contractures douloureuses dans le cas de la spasticité). Le médecin adapte alors le traitement médicamenteux en fonction de la cause.

En plus de la thérapie médicamenteuse de la douleur, il existe diverses formes de traitements non médicamenteux qui sont destinées à soutenir le traitement de la douleur. Il s’agit par exemple de techniques physiothérapeutiques de soulagement employées contre la douleur causée par la spasticité, mais aussi de techniques de relaxation visant à prévenir l’augmentation de la douleur psychologique. Les méthodes d’ergothérapie pour améliorer la sensibilité (p. ex. pour la sensation d’engourdissement) peuvent également être utiles.

Résultats du Registre SEP

Deux des trois symptômes les plus fréquents en cas de SEP sont invisibles*

Fatigue

La fatigue est bien plus qu’une sensation d’épuisement. Il est difficile de communiquer ce symptôme aux personnes qui ne sont pas concernées, de sorte que les personnes atteintes sont souvent confrontées à un manque de compréhension de la part de leur environnement social ou de leur employeur. La fatigue est un symptôme très courant de la SEP, elle peut être permanente ou soudaine et ne peut pas être surmontée par la simple volonté. On ne peut donc pas juste «faire un effort». La fatigue est associée à une sensation de grande faiblesse physique, qui se produit souvent dans les jambes et peut entraîner des problèmes d’équilibre et de marche.

«J’ai toujours voulu avoir des enfants et j’imaginais comment je skierais avec eux, jouerais au football, me promènerais, ferais des bêtises – mais avec la SEP, ce n’est plus possible, je suis trop fatiguée.»

«Les bras, les jambes – on peut vivre avec cela. Mais la fatigue, c’est tout simplement terrible. Elle dégrade énormément la qualité de vie.»

«À un certain moment, la force de mes jambes diminue et je me fatigue beaucoup plus vite qu’avant.»

Gérer la fatigue avec la force et un entraînement physique

Une bonne gestion de la force et de l’entraînement physique peut contrecarrer la fatigue, même si elle ne peut pas être complètement éliminée. Outre les médicaments et les traitements physiques (p. ex. le port d’un gilet rafraîchissant en été), l’utilisation prudente de ses propres ressources est particulièrement importante en cas de fatigue. Plus on connaît son «bilan énergétique», plus on y parvient, car il est très différent d’un individu à l’autre. Tenir un «journal de bord de la fatigue» peut être très utile, tout comme un «calendrier des maux de tête». Il convient de noter les heures de la journée et la durée des phases pendant lesquelles on se sent particulièrement fatigué ou particulièrement performant et en forme. Il est ainsi plus facile de planifier à l’avance les événements et les projets qui nécessitent une «dépense énergétique» particulière.

L’activité physique régulière réduit la fatigue et devrait avoir une priorité élevée dans la planification hebdomadaire. Le choix de l’activité dépend des préférences et des possibilités individuelles.

Comme la SEP elle-même, les symptômes qui y sont associés ne sont pas guérissables. Cependant, il est possible de composer avec ces symptômes au quotidien. Les offres de thérapie neuropsychologique, de physiothérapie et d’ergothérapie jouent un rôle central dans le renforcement de la performance mentale ou physique. Grâce à des stratégies éprouvées dans la vie de tous les jours, il est possible d’optimiser ses propres performances afin d’en tirer le meilleur parti malgré la SEP.

Texte: Prof. Pasquale Calabrese, Université de Bâle