Soirée d’information – SEP et Intimité

Le14 novembre 2017, une septantaine de personnes se sont déplacées à Beaulieu à Lausanne pour une soirée d’information dédiée à la sclérose en plaques et à l’intimité. Au cours de cette soirée, trois intervenants ont respectivement abordé  les troubles urinaires, l’intimité et les  modalités de la recherche dans les nouveaux traitements dans le cadre de la SEP.

Pendant la première partie, le Pr Dr Brigitte Schurch, responsable de l’unité neuro-urologie au CHUV, s’est penchée sur  la physiopathologie des problèmes urinaires et les traitements possibles.

La vessie et la miction sont sous contrôle neurologique constant. Les troubles sphinctériens (appareil de clôture-ouverture) ou de vidange de la vessie trouvent donc une explication objective dans le cadre de la SEP. Pr Dr Schurch a abordé deux formes de troubles liés à la vessie: la vessie «nerveuse» et la vessie «paresseuse». Elle a par ailleurs rappelé qu’il est primordial de constater ces troubles et de les documenter le plus tôt possible.

Les traitements  permettent de protéger les reins en augmentant la vidange vésicale et d’améliorer la qualité de vie en réduisant l’incontinence ou en apportant les aides pour y faire face. Pr Dr Schurch a abordé plusieurs pistes de traitement: la physiothérapie du plancher pelvien, l’électrostimulation ou  la relaxation afin de renforcer  les sphincters, les changements de comportement (mictions régulières, limiter café et thé, améliorer le mouvement et proscrire le tabac), les traitements médicamenteux, comme les anticolinergiques et la toxine botulique (Botox) injectée par cystoscopie avec action sur la contraction vésicale et la neuro modulation (électrode au niveau sacré,  reliée à un pace maker installé sous la peau) qui favorise le remplissage vésical. Aux traitements s’ajoute l’aide pratique comme les auto-sondages si le résidu persiste et les infections sont fréquentes. Et si l’incontinence demeure (de manière constante ou occasionnelle), il existe de nombreux  moyens auxiliaires pour homme et femme

En résumé, les problèmes liés à la vessie et à la miction, présents dans le cadre de la SEP, peuvent péjorer la qualité de vie de façon significative. L’objectif prioritaire du Pr Dr Schurch est de reconnaître ce problème, de rendre la discussion possible et d’encourager les personnes à consulter car il existe des possibilités de traitement et d’aide pour y faire face.

La deuxième partie, intitulée «Comment transformer les contraintes en opportunité!», était consacrée aux problèmes psychologiques liés à la sexualité. Elle était présentée par Virginie Emery, psychologue-sexologue. Lors de son intervention, la psychologue-sexologue s’est penchée sur les croyances et les problèmes liés à la sexualité, mais également sur les pistes permettant de retrouver une vie sexuelle épanouissante. Elle a commencé par rappeler que la sexualité concerne tout le monde et que le voyage amoureux est important et souvent tout aussi plaisant que le rapport sexuel et l’extase.

La sexualité est constamment influencée par des problèmes, des événements particuliers ou des croyances bien ancrées. Afin d’illustrer les croyances populaires concernant ce sujet, Virginie Emery à présenté aux participants quelques exemples concrets, comme «tout contact physique doit mener à un rapport sexuel», «un homme sait  toujours ce qu’il doit faire», «l’activité sexuelle est naturelle et spontanée» ou encore «le manque d’érection ou de désir signifie l’absence du sentiment amoureux». Par la suite, elle a cité des difficultés pouvant être en lien avec la SEP comme les spasmes musculaires, les douleurs, l’incontinence ou les urgences mictionnelles ou encore un état dépressif et des événements particuliers tels que l’effet du temps et la routine, les enfants et la transformation du corps.

Pouvoir aborder, comprendre et parler de ces éléments constitue un pas important pour avoir ou retrouver une vie intime épanouissante. Afin d’aider les personnes atteintes et leur conjoint, Virginie Emery a donné des conseils concrets aux participants: prendre soin de la relation à l’autre, favoriser la communication, la parole bienveillante et l’écoute amoureuse, revoir les priorités, se donner des rendez-vous, créer une bulle intime, sortir des rôles quotidiens, soigner l’hygiène, cultiver la séduction varier les lieux ou encore prendre le temps de redécouvrir le corps en explorant de nouvelles zones érogènes et s’accorder les pauses nécessaires afin de jouer des contraintes. Et finalement, pour limiter les problèmes liés aux contraintes physiques, un regard particulier sur le confort est essentiel. Ce sujet peut toutefois être difficile à aborder, la psychologue-sexologue encourage alors tout le monde à oser en parler et à demander conseil à son médecin, un psychologue ou un sexologue.

La soirée s’est poursuivie avec l’intervention du Pr Dr du Pasquier concernant la recherche sur les traitements médicamenteux, intitulée «comment une molécule prometteuse devient un médicament?»

Pr. Dr du Pasquier présente le voyage d’une molécule jusqu’au médicament prescrit et remboursé comme une véritable odyssée semée d’écueils. La recherche clinique commence lorsqu’une molécule prometteuse est découverte, elle se divise alors en 3 phases distinctes durant lesquelles sont testés la sécurité (phase 1) l’efficacité (phase 2) et l’adéquation du médicament (phase 3)  mesurée auprès de sujets atteints chez qui l’efficacité est mesurée en comparaison avec les personnes prenant un autre médicament déjà sur le marché et/ou avec des personnes ne prenant aucune substance active (un placebo).

Lorsque toutes ces phases sont passées avec succès, le médicament est présenté à Swissmedic pour une homologation finale. En cas d’acceptation, l’OFSP (Office fédéral de la santé publique) et le propriétaire du médicament (industrie pharmaceutique) vont parler du coût final du médicament prescrit. Puis l’OFSP entrera en négociations avec les assurances pour en assurer le remboursement.

Une  recherche complète jusqu’à homologation du médicament peut coûter jusqu’à 1 milliard de francs et durer plus de 10 ans. Dès la découverte de la molécule, les chercheurs vont régulièrement contacter les médias et intéresser ainsi les industries pharmas.  Les personnes atteintes de SEP peuvent alors imaginer que le médicament sera disponible prochainement, cependant il n’est pas garanti que ce dernier passe tous les tests et cela peut prendre beaucoup de temps.

Par ailleurs, une 4ème phase est devenue fréquente suite aux problèmes liés aux effets secondaires du Tysabri en 2006. Lors de cette phase, l’efficacité du médicament est observée chez le patient et les effets secondaires sont monitorés/vérifiés selon des protocoles établis et suivis scrupuleusement pendant plusieurs années, voire toute la durée du traitement et cela parfois même après l’arrêt.

Enfin, Le Pr. du Pasquier a brièvement présenté le tout dernier médicament arrivé au terme de ce grand voyage, l’Ocrevus® (orcrelizumab) et a souligné qu’il est  prometteur pour les SEP d’évolution «primaire progressive». Il a par conséquent invité les participants à en parler avec leur neurologue s’ils se sentent concernés.

Pour conclure, le message commun des intervenants est: «osez parler de vos soucis, ils sont bien réels et des professionnels  peuvent vous aider à trouver des solutions pour améliorer votre qualité de vie».

Un grand merci aux intervenants et à tous les participants qui, par leur présence et leur intérêt, prouvent l’importance de ces soirées d’information.