Visage de la SEP: Christophe Kehrli

Visages de la SEP

Pour Christophe Kehrli, le diagnostic de la sclérose en plaques est tombé à l’âge de 25 ans, alors qu’il commençait sa carrière tout en poursuivant ses études. Si sa SEP progressive avance peu à peu, le sport, sa famille et son travail lui donnent chaque jour la motivation pour trouver des solutions aux enjeux et conserver un niveau de vie agréable.

De quelle manière s'est déroulé le diagnostic?

Mon premier contact avec des médecins du CHUV a eu lieu fin 2004. J'étais alors employé à 80%, je faisais des études en parallèle et j’enchainais également un cours de répétition à l’armée, une période bien chargée. Au niveau énergie, j'étais très à plat et j'ai commencé à avoir des insensibilités et des décharges dans la jambe gauche. Heureusement, c'est vite reparti. Cela s'appelle le «syndrome de la chaussette» car on a l'impression d'avoir une chaussette sans en avoir. J’ai passé une IRM, une ponction lombaire et le diagnostic est tombé de manière assez brutale : une sclérose en plaques.

Qu’avez-vous ressenti lors du diagnostic?

Sur le moment, cela m’a fait un coup, j’ai toujours eu de la fatigue donc je me suis dit que cela devait être lié.  Ce qui est difficile avec la sclérose en plaques, c'est qu'il n'y a pas de benchmark. Pour moi qui travaille dans la finance, j'aime bien avoir des indicateurs, de quoi mesurer, voir des évolutions. Avec la sclérose en plaques, on n’a pas tout ça. C'est une histoire de ressenti et chacun a sa propre histoire avec la SEP.

Qu’est-ce qui vous fait du bien au quotidien ?

J'ai toujours été sportif et pour moi le sport est de loin le meilleur médicament. Quand je pratique du sport, je me sens tout de suite mieux. L'évolution de ma sclérose en plaques progressive fait qu'il y a une détérioration de ma santé assez lente et constante. Cela génère de la fatigue. En conséquence, j'ai dû arrêter les sports que je faisais comme le volley ou le basket. Je faisais vraiment beaucoup de choses mais avec les années j'ai dû réduire. Je nage toujours beaucoup heureusement, et j’ai toujours pu m'adapter selon mon état de santé, avec des bâtons pour me déplacer, avec une chaise spéciale pour entrer dans l’eau, toutes ces solutions permettent de ne pas se limiter dans ses activités, et de se maintenir en forme. J’ai également un vélo trois roues et j'adore faire des sorties avec ce système car on pédale avec les mains et avec les jambes tout en ayant les pieds sécurisés, cela permet vraiment de travailler l'ensemble du corps. On dort beaucoup mieux la nuit en ayant pratiqué du sport la journée et on évacue du stress, c’est vraiment le meilleur médicament.

Comment est-ce que la maladie a évolué? 

Je n'ai jamais eu de douleurs mais plutôt des insensibilités qui ont pris petit à petit le dessus. Jusqu'en 2020, je marchais sans moyens auxiliaires et, dès 2020, je me suis aidé de bâtons, surtout pour la sécurité. Avec le recul, je l’aurais fait plus tôt car cela montre aux personnes externes qu'il y a une maladie et que je n’ai pas simplement abusé de l’apéro (rire).

Comment se déroule votre quotidien?

Pendant trop longtemps je me suis dit «serre les dents ça va passer». Maintenant que j'ai accepté d'avoir des moyens auxiliaires comme un déambulateur et une chaise roulante cela va beaucoup mieux dans mon quotidien parce que je ne me prive pas de faire certaines activités. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, cela facilite vraiment le quotidien d'avoir une chaise. Avec le recul, j'aurais dû le faire avant. Pour moi, à chaque problème, il y a une solution : il y a toujours des moyens existants pour se faciliter la vie. Je me déplace aussi beaucoup avec ma chaise roulante motorisée que j'appelle «ma Tesla une place», cela me donne plus d'autonomie car c'est très puissant. Ce sont les détails qui font que la vie quotidienne est plus facile et plus agréable.

Quand je vais en vacances en Italie je demande également une chaise roulante de plage qui permet de ne pas être bloqué dans le sable et qui permet de se baigner, c’est génial!  Il faut juste se renseigner et prendre le temps de trouver des solutions.

Quel est votre ressenti face à la SEP?

Quand j'ai été diagnostiqué j'ai dit à mon médecin «Mais pourquoi moi»?  Ayant toujours été sportif, n’ayant jamais fumé et ayant toujours eu une bonne hygiène de vie. C’est à se demander pourquoi la SEP est tombée sur moi. Il y a une forme d'injustice avec cette maladie. Cependant, les médecins m’ont dit que le fait d'avoir été très actif avec une bonne hygiène de vie a probablement contribué à ralentir ou diminuer les effets de la maladie, ce qui n’est pas anodin.

Est-ce que vous avez dû adapter votre logement?

J'ai la chance d'avoir un logement au rez-de-chaussée qui est moderne et aux dernières normes, donc je ne souffre pas trop de la chaleur en été et je peux profiter de ma terrasse. Avec les années et le réchauffement climatique qui est toujours plus présent, la chaleur va être de plus en plus difficile à supporter pour les personnes qui ont la SEP, mais aussi pour les autres personnes. Il est vraiment important pour moi d’habiter dans un environnement adéquat et j’ai de la chance d’être dans cet appartement. J'ai conscience que ma situation est très confortable par rapport à d'autres personnes.

Comment a évolué votre situation professionnelle?

J’ai commencé à travailler en 2001 et j’ai été diagnostiqué en 2004 soit juste quelques années plus tard.  J'ai tout de suite parlé de ma SEP à mes supérieurs et j'ai ressenti beaucoup de compassion et de compréhension, heureusement. Avec la fatigue, cela devenait presque obligatoire d’en parler afin que mes collègues comprennent pourquoi je faisais un peu de télétravail et pas eux. J’étais très précurseur niveau télétravail pour le coup, surtout que j'ai la chance d’effectuer un travail qui peut très bien se faire à la maison. J’ai aussi une rente AI qui est en cours d'établissement mais j'espère pouvoir encore travailler à un taux intéressant car ça me fait du bien mentalement et cela permet de garder un rythme. Je suis resté à 100% jusqu’en mars 2023, alors que j'aurais très bien pu adapter mon taux plus vite, en accord avec mes médecins.  Aujourd'hui, je suis à 60 % et cela me convient bien car cela me permet de garder quand même une activité principale mais également de pouvoir gérer la fatigue et les symptômes à côté.

Quelles sont vos autres activités ou passions?

Entre mon travail à 60 %, le sport que je pratique régulièrement et la famille avec ma femme et mes deux enfants de 16 ans et 13 ans je suis bien occupé. Je suis content de pouvoir aussi participer à la maison et le fait d'avoir la chaise roulante me permet d’accomplir plus de tâches, je ne m'ennuie jamais. Je trouve qu’il faut aussi se dégager des moments pour ne rien faire, afin de déconnecter complètement. 

Comment est-ce que vos enfants voient la maladie?

Mes enfants m’ont toujours connu avec cette maladie qui progresse peu à peu, ils ont donc l’habitude si on peut dire. Ils me voient de temps en temps chuter mais comme je n’ai jamais eu de poussée nécessitant une hospitalisation, ils s’habituent. Les jeunes s'habituent plus vite que les adultes à de nouvelles situations.

Comment cela se passe avec votre entourage? 

Tout d'abord je dois dire que mes enfants, ma femme et ma famille sont toujours prêts à donner un coup de main et je les en remercie. J'ai réalisé avec les années que les gens sont toujours prêts à aider. Il y a aussi des gens qui ne comprennent pas trop le concept de maladie invisible, ou peu visible. Par exemple, j’ai eu des remarques que j’utilisais une place pour personne handicapée alors que je marchais encore assez bien. Il y a des maladies qui ne sont pas visuelles et qui nécessitent pourtant de l'aide, que ce soit une place de parc ou autres.

Un conseil à donner aux autres personnes atteintes de SEP?

La SEP, c’est une recherche personnelle et constante pour trouver le juste équilibre entre penser à soi, penser aux autres et penser à l’instant présent, sans essayer de refaire le passé ou trop se projeter dans le futur. Il y a aussi tellement de solutions existantes pour faciliter le quotidien, il faut juste avoir l’énergie et la motivation de s’y intéresser.


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